• Burghölzli, Zurich. La clinique de Freud, Jung et Heidegger

    <figure class=" ob-pull-left ob-media-left ob-img-size-300 ">  Burghölzli, Zurich. La clinique de Freud, Jung et Heidegger </figure>

    Voici un article extrait de philosophie magazine (mars 2011, N°48) qui évoque une clinique assez idéale pour l'époque, située en Suisse, siège de Jung. "Burghölzli" est le nom donné à la clinique psychiatrique de Zürich, considéré vers 1890 comme un établissement d'avant-garde. Comme on peut le lire dans l'article, on y pratique plus volontiers la musicothérapie que la psychiatrie à outrance. Ce lieu privilégie l'humanisme, propre à "l'école de Zurich". C'est un endroit dans lequel a travaillé Jung. Eugen Bleuler, psychiatre qui a inventé le mot "schizophrénie" ,dirigeait cet établissement.

    Burghölzli à Zurich. La clinique de Freud, Jung et… Heidegger

    La ville des banques et des assurances accueille un établissement psychiatrique un peu à part, où la psychanalyse et la phénoménologie ont jadis pris leurs quartiers.

    La ville la plus peuplée de Suisse ne cache pas que des coffres-forts bien remplis. En retrait du centre-ville médiéval, la colline boisée du Burghölzli abrite une clinique psychiatrique universitaire où souffle, depuis 1870, l’esprit avant-gardiste et humaniste qui caractérise « l’école de Zurich ». Vaste et imposant, l’établissement connaît son âge d’or à la Belle Époque, sous la direction d’Eugen Bleuler. Ce dernier bannit l’usage de la camisole de force. Convaincu que ce n’est pas en classant les pathologies que l’on soigne les malades, Bleuler promeut une psychiatrie « dynamique », fondée sur la relation entre médecin et patient. En travaillant sur la « démence précoce », qu’il nomme « schizophrénie », il remarque que les mécanismes inconscients qu’un certain Freud vient de mettre en évidence à Vienne sont indispensables pour en comprendre les symptômes ; il est le premier professeur d’université à lui apporter son soutien, à la stupéfaction de ses collègues suisses et allemands.

    Dans les années 1900, le Burghölzli est la plaque tournante des échanges entre psychanalyse et psychiatrie, sous la houlette de C. G. Jung , jeune talent repéré par Bleuler et « fils spirituel » désigné par Freud. À ses côtés, de futurs grands noms, comme Ludwig Binswanger, père de « l’analyse existentielle », ou Hermann Rorschach, qui invente le test de personnalité, font leurs armes. Les relations entre Zurich et Vienne s’assombrissent pourtant. Bleuler demande à Freud de l’analyser par correspondance pour lui prouver les bienfaits de sa méthode. Pour le psychiatre suisse, c’est un échec ; pour son analyste, c’est le signe de sa résistance émotionnelle… Lassé par ce sectarisme, Bleuler se retire du mouvement freudien. Entre Freud et Jung, l’idylle tourne aussi au vinaigre. Les délires d’un de ses patients au Burghölzli, surnommé « l’homme au soleil phallique », mettent Jung sur la voie d’un inconscient collectif, hanté par des archétypes mythologiques ; focalisé sur la libido de l’individu, le pape de la psychanalyse crie à l’hérésie et bannit son dauphin en 1912.

    Psychiatrie universitaire et psychanalyse divorcent, ce qui n’entamera guère la créativité du centre zurichois, où Manfred Bleuler perpétue l’esprit d’ouverture initié par son père. À partir de 1959, le Burghölzli ouvre ses portes à Martin Heidegger : pendant dix ans, deux à trois fois par semestre, le philosophe allemand, dont les Séminaires de Zurich sont traduits depuis peu, initie médecins et étudiants à sa vision phénoménologique de l’être, comme existence ouverte au monde et à l’autre. En 1968, la démolition du mur d’enceinte a valeur de symbole : indifférente aux chapelles, la colline du Burghölzli est aujourd’hui encore l’emblème d’une psychiatrie humaniste, où l’on pratique plus volontiers la musicothérapie que la médicamentation à outrance.

    Par Mathilde Lequin

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