• Les préjugés sur la notion de maladie mentale ont la vie dure

     

    Les préjugés ont la vie dure mais ils ne sont pas insurmontables

     

     

      Il me semble que le discours ambiant sur l’idée de folie et de maladie mentale aujourd’hui conduit la plupart des gens qui ne se sont pas penchés sur la question à être méfiants, vis-à-vis des malades. Je l’étais moi-même au départ. On nous fait croire que ces personnes sont complètement déconnectées de la réalité, qu’ils délirent en permanence, que la maladie est nocive pour tout le monde et insurmontable. L’idée généralement véhiculée est que ces personnes sont inguérissables et qu’elles finiront leur vie dans un vase clos, incapable du moindre éclair de raison. Lorsque j’ai découvert de près ce qu’on nomme la folie, je sentais que ces discours ambiants clochaient, qu’ils sonnaient faux. Mais je n’imaginais pas quel travail, quelles recherches il fallait accomplir pour en sortir et pour tenter d’approcher au plus près la vérité, bien que l’atteindre serait prétentieux. La justesse dans ce domaine demande de nombreux efforts, puisque les préjugés ont la vie dure. Il faut avoir le courage d’affronter toutes les idées négatives, les gens décourageants et pessimistes, l'absence de foi,  les peurs du monde médical et de ceux qui se disent « normaux », se croyant intouchables.

     

      Il faut déjà se questionner sur le système psychiatrique -qui après deux ans de recherche assidue et de discussions avec des gens qui ont vécu la maladie- me semble conservateur et profondément archaïque. La médecine se base principalement sur l’administration de médicaments, oubliant totalement qu’un être qui souffre a besoin d’un cadre affectif serein, d’un soutien moral, de chaleur humaine, de confiance, d’amour, de soin. Or, lorsqu’on tombe malade et que les délires surgissent, il n’est d’autres remèdes que celui de la chimie ou pire de la camisole chimique : on endort les gens, on les prostre, on anesthésie leur douleur pour qu’ils taisent leur mal-être et qu’ils ne dérangent plus. Or, le seul moyen que le corps a de s’exprimer, c’est par la souffrance lorsque quelque chose ne va pas et au lieu de tenter de répondre à ce signal rouge, on le supprime.

     

      J’en suis arrivée à l’idée que la folie dérange, car elle est irrationnelle, qu’elle ne s’explique pas en faisant appel à  la logique ordinaire. Elle garde une part de mystère : on ne sait pas exactement pourquoi elle surgit, ni pourquoi elle s'installe et pourquoi elle s’en va parfois. Dans une époque où la raison est dominatrice, où la science croit pouvoir maîtriser l'essentiel, où l’orgueil humain ne cesse de croître, la folie humaine qui sort de tout cadre perturbe. C’est pourquoi on tente de la faire taire par tous les moyens, de ne pas entendre ce qu’elle dit. Elle crie le mal-être social, les abus, les traumatismes, mais elle ne le dit pas de façon limpide, plutôt sous forme cauchemardesque et parfois violente. On parle alors de folie furieuse. Cependant, cette expression d'un mal violent n'est pas la règle. Nous ne sommes plus à l’époque des humanistes, au XVIème siècle, lorsqu’Erasme écrivait L’Eloge de la Folie en latin, mais plutôt à un moment où on pense qu’on n’a plus besoin du religieux pour s’épanouir, que la science peut résoudre la plupart des problèmes.

     

      J’ai donc appris, moi qui n’ai pas directement vécu l’expérience de la folie, que les gens qui la vivent ne sont pas forcément violents, méchants, perpétuellement dans l’illusion. J’ai donc appris que ce sont des personnes souvent très lucides, généralement hypersensibles, qui ont dû surmonter des événements intérieurs très durs que le délire était une façon pour le cerveau d’évacuer ce trop-plein d’émotions négatives, qu’il est la soupape avant l’explosion complète de l’homme, à savoir sa mort, son anéantissement.

     

      Je sais aussi que la schizophrénie n’est pas forcément une fatalité, que des gens s’en sortent et peuvent en venir à bout, malgré tous les préjugés qui reposent sur cette maladie et la connotation péjorative du mot.

       Ainsi, j’ai découvert un monde différent dans lequel l’espoir existe pour tout être qui cherche à s’en sortir et à retrouver un équilibre perdu dont il n’est souvent pas entièrement responsable. Les maux de la société sont inscrits dans ces visions cauchemardesques qu’il serait important de ne pas nier et de prendre à bras le corps, afin d’aller vers une société plus humaine, plus digne et plus juste.

      

    Sibylline.

     

     

     

     

     

    « Traitement surprenant par son efficacité et sa rapidité de la schizophrénieD'où vient le mot "guérir"? »
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